Répression contre deux désobéisseurs... La classe "verte" n'aura pas lieu !
Marseille le 5 avril 2009
"L'élève au centre du système éducatif"?
Une évidence pour toute personne préoccupée d'éducation.
Cependant la loi d'orientation pour l'école de 1989 a cru nécessaire de l'inscrire noir sur blanc dans son introduction . Cette approche permettait de prendre en compte toutes les différences, les inégalités avec lesquelles l'enfant et sa famille se présentent à la porte de l'Ecole. Son corollaire était " la réalisation de cet objectif demande du temps" .... donc de l'argent, pensons-nous aussitôt.
Qu'en est-il 20 ans plus tard?
Ce sont les savoirs fondamentaux qui sont au centre : "le socle commun de connaissances et de compétences institué par la loi d'orientation et de programme pour l'avenir de l'École du 23 avril 2005 est la référence indispensable autour de laquelle seront organisés tous les enseignements de ce premier niveau de la scolarité obligatoire".
Les différences ne sont pas gommées mais leur traitement est majoritairement externalisé hors du temps scolaire (soutien et aide personnalisée sur le temps de loisir de l'enfant). En effet, l'importance de la différenciation, sur laquelle tout le monde s'accorde, au sein d'une classe de 25 élèves avec un seul enseignant, relève du voeu pieux. Par cette approche, les différences deviennent des anormalités qu'il faut traiter de manière chirurgicale, avec le risque incontournable d'une aggravation de la marginalisation de ces élèves.
Cette approche qui est aux antipodes de la loi d'orientation de 1989 - qui n'a pas eu les moyens financiers de son ambition - crée nécessairement du malaise chez les enseignants qui côtoient quotidiennement les élèves dits "en difficulté" et veulent toujours croire à une autre école où la différence - et non la norme-serait une chance.
Certains de ces enseignants dépriment dans leur coin, d'autres se contentent de parler et d'autres encore posent des actes accompagnés de propositions alternatives.
Nous avons choisi le 3ème camp, forts de notre expérience et de notre réflexion au service de l'éducation des enfants:
- nous refusons d'appliquer les programmes de 2008 mais avons toujours appliqué les programmes définis par la loi de 1989 ou de 2002
- nous refusons l'inspection car elle n'est que le contrôle de la mise en application des directives ministérielles que nous rejetons
- nous refusons de mettre en place l'aide personnalisée mais nous avons mis en place des ateliers de loisir le midi
- nous refusons de faire passer les évaluations nationales mais nous évaluons les progrès de nos élèves
- nous refusons de faire le soutien pendant le temps de vacances des enfants mais ils se reposent et nous aussi
- nous refusons de collaborer à la mise en place du fichier Base-élèves mais cherchons à la bloquer par tous nos moyens
- nous refusons la chasse des élèves et des parents sans papiers mais nous les aidons
- nous refusons de nous déclarer gréviste 48h à l'avance mais nous mettons en grève s'il le faut
Tous ces refus ont été déclarés à l'administration locale (Inspecteur), départementale ( Inspecteur d'Académie), nationale (Ministre) par voie de courrier et font de nous des désobéisseurs.
Face à ces prises de position, les réponses de la hiérarchie, jusqu'à présent, n'ont été pour nous, comme pour les 2700 désobéisseurs de France, que dédain, pressions, sanctions financières et menaces disciplinaires.
Aujourd'hui, un nouveau cap est franchi dans la panoplie des sanctions: puisque qu'aux pressions et aux sanctions nous répondons: "cela ne nous atteint pas" . En effet, nous avons fait le deuil d'être considérés par ces gens-là comme de "bons enseignants", donc le deuil de faire carrière dans l'éducation et que l'argent n'est pas une priorité dans notre vie, d'autant que la solidarité financière s'organise.
La hiérarchie fait le choix de nous sanctionner au travers de ce qui nous touche au plus haut point: l'intérêt des enfants!
Nous enseignons à l'école des Convalescents, dans le quartier de Belsunce à Marseille - école classée en "zone violence" (violence de qui?)
Nous avons soumis à notre hiérarchie un projet de classe verte à la montagne pour 12 jours au mois de juin prochain. Il concernait 40 enfants qui ne sortent pour la majorité jamais de chez eux , si ce n'est pour certains pour aller au "bled". Le tarif défiait toute concurrence, car calculé au quotient familial, soit environ 150 euros (auquel on pouvait retrancher une aide de 50 euros de la Caisse des écoles, plus les aides individuelles de la CAF) . L'orientation pédagogique se faisait essentiellement sur 2 axes: la découverte du milieu montagnard et la pratique de sports ( vélo, randonnée et escalade). Le taux d'encadrement était idyllique pour la classe: l'enseignant et 2 animateurs vie quotidienne, plus les animateurs sportifs diplômés.
Tous ces détails pour montrer que rien sur le plan pédagogique ou de la sécurité n'était attaquable.
Sa réponse nous est arrivée par voie de mail de manière laconique: "avis défavorable et transmission à l'Inspection Académique".
Cette nouvelle forme de sanction affirme le mépris ouvert pour l'intérêt des enfants de ces gens-là qui sont aux commandes de l'Education Nationale et nous conforte dans l'analyse que l'ensemble des mesures prises ne prend nullement en compte les intérêts des enfants mais sont au service d'une idéologie politique, aujourd'hui libérale.
Aussi avons nous décidé lors de l'AG "de la maternelle à l'université" d'informer et d'interpeller le rouage du système répressif qu'est notre Inspectrice en allant lui demander des comptes.
Nous appelons les enseignants, les parents, les citoyens scandalisés par cette répression à nous rejoindre :
MERCREDI 8 AVRIL, 9H30
sortie du métro rond point du Prado, côté stade vélodrome
Christine Jousset - Erwan Redon - école des Convalescents - Marseille 1er