Lettre ouverte aux élus de la République

Lettre au format word

Mesdames et messieurs les maires

Mesdames et messieurs les députés

Mesdames et messieurs les sénateurs,

 

La réforme de l'école publique primaire avance à marche forcée.

Après les suppressions de postes (-25000 en deux ans) répondant au dogme du non renouvellement d'un fonctionnaire sur deux partant en retraite, le gouvernement va entamer la réforme du statut même de nos écoles.

 

Mais revenons un instant sur la liste des changements déjà engagés

.

Des programmes fortement teintés d'idéologie passéiste, rejetés majoritairement par la profession et les plus éminents pédagogues ;

Des évaluations nationales cachant mal une volonté de mise en concurrence des écoles ;

Des Réseaux d'Aides Spécialisées aux Enfants en Difficulté (RASED), démantelés

La suppression de 2 heures de classe par semaine pour l'ensemble des élèves

La surcharge des journées de classe pour les élèves repérés en difficulté, par la mise en place d'un temps d'enseignement hors temps scolaire

Des associations complémentaires de l'éducation nationale mises en grave difficulté financière 

Le renforcement du financement public des écoles privées : « l'article 89 » même amendé, contraindra dans la majorité des cas, les communes à financer des écoles privées en dehors de leur territoire …

 

Intéressons-nous, maintenant, à 2 réformes en préparation, celles qui vont relever directement de la gestion des communes (Jardins  d'éveil et EPEP)

 

Les jardins d'éveil et les Établissements Publics d' Enseignement Primaire (EPEP)

sont deux réformes majeures qui vont profondément modifier la forme,le rôle, la répartition et le financement de l'école publique.

Dans ces 2 réformes, l'implication des communes en terme de responsabilité et de financement sera déterminante.

 

Les jardins d'éveil :

 

Michèle Tabarot, chargée de la préparation d'un rapport sur le sujet :

« Je propose donc de confier aux communes et intercommunalités une compétence facultative en matière de développement de l'offre de garde et la responsabilité de l'accueil de la petite enfance »…

Ce mode d'accueil inclurait une participation financière des familles. …

Le coût unitaire par enfant a été estimé à 6 200 € …

L'accès au jardin d'éveil dès deux ans pourrait devenir, à terme, possible pour la quasi-totalité des enfants âgés de 2 ans, y compris les enfants handicapés. Ce mode de garde innovant est une alternative de qualité à l'école maternelle, qui devrait constituer une première étape de la mise en œuvre du droit de garde.

 

Le rapport « Thélot » est très éclairant à ce sujet :

« Le Rapport Thélot souhaitait introduire la scolarité obligatoire à partir de 5 ans et que ces enfants soient rattachés au cycle II.

Par ailleurs, M Théot a affirmé en février 2004 que, dans un avenir proche, les postes d'enseignants seraient payés par les communautés de communes. Si les communes doivent un jour payer les enseignants, l'école maternelle n'existera plus que dans les communes riches et/ou dans celles qui y croient vraiment. »

 

Non seulement la création des jardins d'éveil aura inévitablement des conséquences sur le budget des communes, mais à terme, c'est le maintien des classes maternelles qui sera remis en question.

 

 

Les EPEP :

 

Préconisé dans le rapport Thélot, repris dans les rapports Camdessus et Attali, le projet de regroupement des écoles primaires dans des structures plus vastes, devrait être discuté au printemps à l'Assemblée et au Sénat.

Selon la proposition de loi qui sera présentée, des Epep constitués de minimum 15 classes seront et pourront être créés. Ils seront administrés par un Conseil d'administration se substituant aux conseils d'écoles actuels, et dirigés par un directeur nommé par l'inspecteur d'académie.

 

Ce qui n'est pas dit dans la proposition de loi c'est l'impact des Epep sur le nombre et la répartition des écoles primaires sur notre territoire.

Le nombre de classes conservées après la première année de fonctionnement dépendra du seuil de fermeture. Bien entendu, les classes isolées ou les écoles à 2 classes seront les premières touchées par ces fermetures.

Est-ce souhaitable en terme d'offre de service public  et d'aménagement du territoire ?

Est-il raisonnable de concentrer les élèves dans des écoles plus grandes avec des classes plus chargées ?

Certains (des inspecteurs d'académie entre autres) n'hésiteront pas à vous affirmer que les petites écoles isolées, avec souvent des classes multi-niveaux sont moins « performantes » que les autres.

C'est oublier un peu vite que des études récentes prouvent le contraire :

( rapport de Mme Françoise Oeuvrard (Direction Evaluation et Prospective du Ministère de l'Education Nationale) et le rapport Ferrier (Inspection Générale de l'Education nationale), corroboré par le rapport Leroy-Audoin (Institut de Recherches sur l'Economie de l'Education)) :

 

Nous savons que, comme nous, vous sous souciez des élèves qui sont confiés à l'école de la République et notamment de ceux qui se trouvent en difficulté dans les apprentissages ;

Nous pensons qu'à travers l'ensemble de ces réformes se profile une dérive certaine vers un désengagement de l'État de l'organisation du système scolaire public.

Nous pensons que le principe essentiel de l'égalité républicaine est gravement remis en question.

Nous pensons aussi qu'il est de votre droit et de votre devoir de vous saisir de ces réformes avant qu'elles ne vous soient imposées, quand d'autres comme la taxe professionnelle par exemple, se profilent en parallèle.

Nous souhaitons des réformes dont l'objet soit vraiment au service des enfants et non celles-ci qui sont principalement guidés par des arbitrages budgétaires.

 

Il nous paraît fondamental aujourd'hui, que se rejoignent les élus, les parents d'élèves et les enseignants dans des actions communes d'opposition à cette destruction programmée de notre système éducatif. D'ailleurs une majorité des enseignants et des parents, lorsqu'ils sont informés, n'approuvent pas ces différentes réformes et tentent de les combattre. Dans ce même esprit, certains enseignants ont choisi en conscience la désobéissance pédagogique, s'exposant ainsi à des sanctions, dans le souci de conserver une  école Républicaine.

 

Enfin, c'est parce que demain le PRÉAMBULE DE LA CONSTITUTION DU 27 OCTOBRE 1946 « La Nation garantit l'égal accès de l'enfant et de l'adulte à l'instruction, à la formation professionnelle et à la culture. L'organisation de l'enseignement public gratuit et laïque à tous les degrés est un devoir de l'État » ne sera plus respecté ; et parce que nous savons que vous allez être confrontés à des décisions touchant à la réorganisation du système éducatif primaire, que nous vous adressons cette lettre ouverte.

 

Mouvement des enseignants en résistance pédagogique

 



05/04/2009
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