Lettre d'un instituteur de Mulhouse (68) à son inspectrice
Bernard BECK
directeur de l’école élémentaire Thérèse
68100 Mulhouse
Mulhouse, le 5 février 2009
à
Mme l’inspectrice d’académie du Haut-Rhin
s/c de Mme l’inspectrice de l’éducation nationale de Mulhouse 1
Madame l’inspectrice,
Je suis directeur d'une école en ZEP de 400 élèves.
Conformément à la commande du ministère, nous avons procédé aux évaluations de CM2 dans les trois classes concernées.
Je ne transmettrai pas les résultats de cette évaluation au ministère.
Cette évaluation, telle qu'elle a été conçue et mise en oeuvre, est un non-sens*.
l Non-sens pédagogique : exercices truffés de pièges, nombreux items portant sur des notions non abordées en janvier, système de notation binaire à l'emporte-pièce
l Non-sens statistique : sous-évaluation des compétences réelles des élèves, disparités aléatoires et inexplicables des scores de plus de 20% d'une classe à une autre
l Non-sens déontologique : porte-à-faux des enseignants devant restituer les résultats catastrophiques aux parents
l Non-sens psychologique : dévalorisation des élèves, estime de soi fragilisée, démotivations assurées
l Non-sens éthique : discrédit de l'école, destruction de la confiance construite jour après jour auprès des parents, mépris des collègues « achetés » par une prime
l Non-sens civique : selon les souhaits maintes fois répétés du ministre, publication d'un classement des écoles donc organisation de la division sociale du pays
Nous, directeurs, nous battons au quotidien pour apaiser les tensions qui envahissent nos écoles.
Je refuse d'être complice d'un système qui, par la violence des chiffres, détruit l'école de l'égalité, de la solidarité et de la réussite pour tous.
Bernard Beck
Membre du collectif « Sauvons l'école pour tous » du Haut-Rhin