Yes, we can !, par Alain Refalo

9 novembre 2008

Oui, nous le pouvons !

Le pouvoir actuel, comme tous les pouvoirs avant lui, compte avant tout sur la soumission du plus grand nombre. Il sait bien que les réformes dans l'Education Nationale sont impopulaires auprès des enseignants, mais il n'en a cure tant que la machine continue à fonctionner. Il s'accommode tranquillement de nos protestations symboliques, de nos pétitions et de nos journées de grève sans lendemain. Tout cela est utile, mais ne constitue pas une force susceptible d'enrayer la machine. La question qui est posée désormais est de savoir si nous saurons construire un mouvement, non seulement de résistance, mais de désobéissance pédagogique qui rende impossible l'application des lois néfastes qui déconstruisent l'Education Nationale.

Ce qui fait la force des injustices, ce n'est pas la loi injuste, mais l'obéissance à la loi injuste. Rappelons-nous les mots prophétiques d' Etienne de La Boétie qui, au XVIème siècle, dans son remarquable Traité de la servitude volontaire, démontrait magistralement que ce sont les peuples eux-mêmes qui sont responsables de la tyrannie et de leur oppression par faiblesse, par couardise ou par lâcheté. Il a eu l'intuition que le peuple pouvait jouer un rôle actif pour se libérer, sans violence, des chaînes qui l'entravent : « Si on ne leur donne rien, écrit-il à propos des tyrans, si on ne leur obéit point, sans combattre, sans frapper, ils demeurent nus et défaits et ne sont plus rien, sinon que comme la racine, n'ayant plus d'humeur ou aliment, la branche devient sèche et morte ». Il concluait en ces termes, sans savoir que cette grande idée allait inspirer notamment Thoreau, Gandhi, Martin Luther King, les dissidents des pays de l'Est et de nombreux combats pour les droits de l'homme sur tous les continents : « Soyez résolus de ne servir plus, et vous voilà libres. Je ne veux pas que vous le poussiez ou l'ébranliez, mais seulement ne le soutenez plus, et vous le verrez, comme un grand colosse à qui on a dérobé sa base, de son poids même, fondre en bas et se rompre ». Les intuitions de La Boétie sont toujours d'actualité, même pour résister aux lois injustes d'un pays démocratique.

C'est notre dernière chance : organiser au sein même de l'Education Nationale la désobéissance ciblée et massive qui créera un vrai rapport de forces avec le pouvoir pour l'obliger à négocier et à retirer les lois, décrets et mesures que nous contestons. Dès aujourd'hui, chacun peut décider, en conscience, d'envoyer une lettre à son inspecteur pour lui signifier son refus d'obéir à telle ou telle disposition en particulier. Et surtout la faire connaître dans son réseau d'amis, de collègues et dans les médias pour élargir le mouvement et recueillir des soutiens. N'oublions pas que plus nous serons nombreux à entrer en désobéissance, plus il sera difficile à l'administration de réprimer et de sanctionner.

En prenant le risque de devenir « désobéisseur », l'enseignant assume ses choix. C'est une désobéissance lucide et responsable. Elle est légitime dans le sens où nous n'avons plus d'autres moyens pour nous faire entendre et nous faire comprendre. Le désobéisseur respecte profondément les lois de son pays, mais en certaines circonstances, il enfreint la loi pour ne pas être complice de l'injustice. Il désobéit pour gripper la machine à produire de l'injustice.

Ce mouvement n'est pas seulement est un mouvement d'opposition. Chacun peut aussi mettre en place aujourd'hui, dans son établissement scolaire, dans sa classe, des projets, des activités, des dispositifs pédagogiques qui seront autant d'alternatives à l'esprit de compétition, de sélection et à la démotivation des élèves. L'enjeu demeure de construire une école du respect, de la coopération, de la solidarité et de la réussite pour tous.

La victoire est possible si nous le voulons !



09/11/2008
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